Tout le bonheur du monde 2.0

Une question d'échelle

Prenons donc une idée, quelque chose qui vous semble important et qui, pour vous, mérite d'être partagé par le plus grand nombre : la reforme de la propriété intellectuelle ou bien le compte des votes blanc par exemple.

Fort de cette idée, vous commencez à rassembler des partisans et là vous déclarez au monde : "Notre idée est géniale, en plus on est plusieurs, on a même fait une pétition avec X milles personnes : convertissez-vous !"

Et vous aurez perdu d'avance.

Car avant de vouloir changer le général, il faut d'abord être capable de changer le particulier. Autrement dit, avant de convertir le monde, essayez donc d'abord avec votre voisin.

Pourquoi le voisin ? Parce qu'il est généralement à la hauteur de sa caricature et donc pas du tout comme vous.

Bref, c'est le cobaye idéal. Car pour le convaincre il vous faudra aller au fond des choses, détailler votre pensée, réfléchir à sa réalisation pratique, aux compromis, etc... Et donc faire dès le départ le travail nécessaire.

Si vous ne parvenez pas à convaincre celui-là, alors il est inutile de faire perdre du temps à tout plein d'autres gens : Vous ne serez jamais capable d'aller jusqu'au bout.

Médiatisation n'est pas adoption

L'autre grand écueil des combats pour changer le monde c'est de confondre la médiatisation et le succès.

Si votre idée passe un jour au 20h, cela ne voudra pas dire pour autant que tout le monde va l'adopter du jour au lendemain. Si votre vidéo fait le buzz sur Youtube, cela n'augure absolument rien sur la suite des événements. Elle peut être oubliée aussitôt après.

Car la médiatisation est par définition éphémère. Et ce n'est pas en bâtissant sur l'éphémère que l'on change le monde.

Votre idée ne doit donc pas être à tout prix visible mais "juste" répandue. Peu importe donc la notoriété de ceux qui l'adoptent, peu importe les médias qui s'y intéressent, il faut la faire accepter par le plus grand nombre de personnes possibles.

Ainsi, pour reprendre le point précédent, après votre voisin vous ne devez pas vous tournez vers les journalistes mais vers tous vos autres voisins, puis votre quartier, puis votre ville, etc...

La médiatisation est une conséquence de l'adoption (en masse) de votre idée. Cela ne doit pas être un moyen, au risque de la voir disparaître aussi vite qu'elle est venue.

Vous ne changerez PAS le monde

Enfin le dernier obstacle majeur lorsque l'on milite pour une idée, c'est de croire que l'on doit convertir la totalité du monde.

Durant vos tentatives de conversion, vous vous apercevrez assez vite que beaucoup de gens ne croit pas en votre idée, qu'ils la trouvent idiote/inutile/inefficace/absurde.
Et quoi que vous fassiez, quoi que vous disiez, une bonne part (disons, à la louche, la moitié) ne sera JAMAIS d'accord avec votre idée.

Pour changer le monde, il faut donc être capable d'accepter de n'en changer qu'une seule partie.

De même qu'il y aura toujours des guerres, des criminels, des imbéciles, ... il y aura toujours des opposants, des inconvertibles. Et vous devrez vivre avec.

Car vouloir être absolu, penser que son idée est l'alpha et l'oméga, ne pourra que vous desservir et rendra à terme votre idée obsolète et inintéressante.

Vous ne changerez donc pas tout le monde, mais au moins vous en changerez une partie.

Que la paix soit avec vous.