Tout le bonheur du monde 2.0

Le blog de Khaos Farbauti Ibn Oblivion. Une vision du monde cynique et poétique.

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3, le tigre, chapitre IV (fin)

3.jpgLa vodka resta quelques instant en suspension, à quelques centimètres de ses lèves. Puis avec les gestes mesurés et appuyés de celui qui veut garder le contact avec la réalité, Piotr termina son geste et but son verre.

La voix n'était rien, un simple contrecoup d'une journée éprouvante, un neurone défaillant qui soudain envoyait des messages aléatoires, qui...

Je peux la sauver

A nouveau la voix, dans sa tête. Volatile, comme une pensée, mais discordante, étrangère. Une voix chaude et suave mais qui figeait le corps en réponse à un instinct animal ancestral : la peur du prédateur.

Mais lorsque le prédateur paraissait provenir de l'intérieur, s'immobiliser et faire le mort ne semblait pas une solution efficace.

"Qui est là ?" demanda Piotr.

Mais, comme il s'y attendait, sa question n'obtint aucune réponse. En bon téléspectateur du XXIème, il avait suffisamment vu de films de science-fiction pour deviner la suite.

"Vous êtes dans ma tête, c'est ça ? lança-t-il à travers la pièce vide. C'était vous tout à l'heure dans le corps de ce forcené ? C'était vous qui m'avez fait sombrer dans l’inconscience ?"

Seul le silence de la cuisine lui répondit.

"Vous êtes un alien venu envahir la Terre ?"

Ha ha ha ha ha ! Un rire tonitruant lui traversa l'esprit et se prolongea plusieurs secondes.

"- Non je ne suis pas un alien, petit flic, finit par lui répondre la voix, je suis bien mieux que ça !
- Mieux ?
- Oui beaucoup mieux. La preuve, c'est que comme je te le disais, je peux la sauver.
- La sauver ? Ma mère ?
- Si tu veux dire par là le tas de loques affalé dans le lit de la pièce d'à coté, alors oui : ta mère.

Avant que Piotr ait pu répliquer quelque chose la voix dans sa tête repris.

- Mais arrêtons là le bavardage, je déteste ça. On va faire simple : Ta mère a un cancer, je peux la guérir. Comme j'ai guéri ta main. C'est simple tu te mets à coté, tu meurs, et hop je passe dans son corps malingre et pourri. Là je lui fait du bien et en 30 secondes elle se lève, peut danser la lambada comme une gamine et voit son expérience de vie s'allonger tellement qu'elle pourra atteindre le double de son age actuel. Deal ?
- Quoi... hein, non ! Attendez ! Je... Je meurs ?!
- Oh oui c'est vrai j'ai oublié le couplet sur la beauté du geste, le sacrifice qui prouve ton amour, la reconnaissance éternel de Maman, blablabla... C'est comme ça que ça marche, il faut mourir pour que je passe dans une autre tête. Et le cancer ça se combat de l'intérieur.
- Mais c'est n'importe quoi, vous êtes fou ?!
- Dit l'homme qui entend une voix dans sa tête... Bon écoute on a bien papoté mais je suis TRÈS pressé. Je suis à l'intérieur de toi, je te vois bien d'ici, je sais déjà que tu vas finir par dire oui. Alors si tu pouvais m'épargner la lenteur de ta réflexion, j'en serais ravi.
- Et si je ne veux pas ?
- Et bien on refera joujou "à qui c'est qui a la plus grosse" au milieu de ta tête comme tout à l'heure à coté du Hummer. Je peux recommencer ad vitam eternam et il te suffira de perdre une seule fois pour que je puisse aller me promener tranquillement dans quelqu'un d'autre.
- Espèce de...
- Oh très bien, l'interrompit la voix, vas-y ! réfléchis puisque tu es incapable de prendre une bonne décision autrement ! Je te laisse quelques minutes le temps de bouger ta matière grise et que tu te rendes compte que tu es prêt à sacrifier ta vie pour ta mère.

Et la voix se tut.

Mais Piotr avait déjà compris qu'elle avait raison. Comment pourrait-il refuser de sauver sa mère, lui qui avait déjà passé tant d'années à essayer de le faire, lorsque l'occasion se présentait enfin à lui ? Comment pourrait-il repousser cette occasion et supporter de vivre ensuite avec ce choix ?

Non, s'il reculait aujourd'hui, il finirait de toute façon par accomplir le pire plus tard, sous le fardeau de la culpabilité. A toute prendre, autant mourir de la bonne manière.

Il prit alors son arme, traversa l'appartement, et entra dans la chambre.

Il y eut quelques murmures, peut-être des sanglots.

Puis un coup de feu et le silence.

Khaos Farbauti Ibn Oblivion

Auteur: Khaos Farbauti Ibn Oblivion

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Izusa Lakota (Ami) ·  15 juin 2011, 09:20

ah il s'est fait attendre mais ça devient très intéressant.... mais en lisant tes chapitres je me demande... tu sais où tu vas où tu vas où te mène l'inspiration ?

Khaos Farbauti Ibn Oblivion (Toujours là) ·  15 juin 2011, 11:03

Les deux mon capitaine ;)

L'intégrale de l'histoire est dans ma tête, du début jusqu'à son dénouement ultime (et même plus parce que chaque personnage a une histoire que je ne raconte pas forcément mais dont j'ai besoin pour me guider dans l'écriture). Mais tant que ce n'est pas écrit il y a des fluctuations, des changements, voire parfois des modifications profondes.

Donc plus j'avance dans l'écriture, plus je fige l'histoire. (et étant donné que j'ai quasiment écrit les 2/3, elle commence à être relativement figée)

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